Billet radio pour la Première (RTBF), 11 décembre 2012 – Ecoutez le podcast
Un an de gouvernement Di Rupo, et chacun a déjà les yeux rivés sur les prochaines élections de juin 2014, date programmée de la fin du monde pour l’Etat fédéral. Si on en croit les informations les rumeurs qui bruissent sous le sapin, le CD&V se rapprocherait à nouveau de la NVA pour négocier alors ensemble.
D’un point de vue francophone naïf, on a envie de dire : négocier quoi encore, à présent que BHV a été scindé et que des paquets de compétences sont transférés aux entités fédérées pour plus de 17 milliards d’euros ? Eh bien paraît-il, il faudrait négocier le passage de la Belgique au confédéralisme. Mais me demanderez-vous, qu’est-ce que donc que le confédéralisme ? « Le confédéralisme est un système politique consistant en l’association de plusieurs Etats souverains et indépendants qui décident de gérer en commun certaines prérogatives par délégation à un pouvoir central. Ils forment alors une confédération.» Figurez-vous qu’en général, les Etats passent par la confédération pour devenir ensuite une fédération. Ce fut le cas des Etats-Unis mais aussi de la Suisse, qui contrairement à ce que suggère son appellation n’est plus une confédération mais bien un Etat fédéral.
Mais aujourd’hui, il n’y a stricto sensu plus aucune confédération sur Terre. Ce que le CD&V et la NVA s’apprêtent donc à nous proposer, c’est de nous faire remarquer une fois de plus aux yeux du monde en devenant un exemple quasi unique de fédération devenant une confédération, une Belgique à deux ou à trois ou à quatre (on ne sait pas) avec un comité permanent qui gérerait tout au plus l’armée et les affaires étrangères. Bref, un « brol » aux contours gluants et informes, mais qui demande sans ambigüité de se construire au départ d’Etats indépendants. Dire le contraire ou le sous-entendre c’est prendre les électeurs pour des truffes. Et c’est sans doute ce qui se prépare.
Comme en 2007, on voit se dessiner une superbe alliance de circonstance entre la NVA et le CD&V autour d’un malentendu volontaire. La NVA veut en réalité l’indépendance de la Flandre, même si elle ne le rappelle que quand ça l’arrange. Comme elle sait que ce mot effarouche une large partie des Flamands, en ce compris au sein de son électorat, elle emploie le terme de confédéralisme, qui signifie la même chose avec un simple enregistrement des bagages avant le décollage. Le CD&V, quant à lui, ne sait plus très bien ce qu’il veut depuis que son grand stratège Yves Leterme a eu l’idée géniale d’en faire la maison du confédéralisme et de la NVA afin de revenir au pouvoir en 2007. Courant depuis lors comme une poule sans tête tel le docteur Frankenstein derrière sa créature échappée, ce vieux parti en crise de valeurs post-chrétiennes voit dans la notion de confédéralisme l’occasion de s’affirmer plus flamand que flamand sans trop effrayer sa base. Certes, c’est là un aveu de vacuité et de manque de projet, mais la nature a horreur du vide. Pourquoi se fatiguer à construire un projet alternatif au nationalisme simpliste et bourgeois de la NVA quand il paraît si simple de suivre la meute ?
Bref, on le voit, le confédéralisme demain sera ce qu’était BHV hier : un slogan vide pour attirer et enfermer l’exaspération d’une opinion publique flamande à qui on explique que tout va mal à cause d’éléments extérieurs – les francophones – et qui, grâce au recours pavlovien à ce genre d’arguments, ne sera par définition jamais rassasiée. Un point de fixation absurde et émotionnel, qui cesse d’être intéressant dès qu’il est obtenu, mais qui est un outil de manipulation des foules vers un destin et contre l’ennemi. Un os qu’on lance et qui, une fois attrapé, n’amène finalement ni soulagement ni paix, mais simplement un nouvel appétit. Un jouet dont le contenu n’a pas vraiment d’importance tant qu’il permet de galvaniser la colère de l’électorat, de lui simplifier l’existence et de lui offrir un bouc émissaire.
Et cela en revanche porte un nom très clair : le populisme.
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Comme vous avez raison, mais comment aller à l’encontre de cette force politique soutenue à tort ou à leurs raisons par un électorat qui suit ses mentors ?
Le confédéralisme est aussi une étape sur la voie de l’indépendance totale des Régions.
Petit à petit, nous aurons notre souveraineté et serons débarrassés de l’État belgo-flamand..
une fois qu’on sera confédérés, je bâtirai une muraille autour de ma maison et je revendiquerai mon autonomie familiale…mes enfants s’enfermeront dans leur chambre et me traiteront de tyran en réclamant leur indépendance ( en plus de leur argent de poche ) J’imprimerai donc ma propre monnaie et je commencerai par convaincre mon voisin qu’à deux on pourrait agrandir notre territoire et puis….mais qui a dit que l’Histoire se répète sans qu’on ait appris quoique ce soit ?